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13 janvier 2010 (mis à jour le 24 janvier 2010)Le "placement de produit" envahit les chaînes de la Communauté françaisePlus le droit de zapper les pubsDepuis le 19 décembre 2009, nos écrans en Communauté française (pas les émissions de radio) peuvent introduire dans leurs programmes des "placements de produits". À l'inverse de la publicité traditionelle qui se situe entre des programmes, cette nouvelle forme "de réclame" se retrouve dans l'émission elle-même. Les frontières entre la publicité et les émissions qui protégeaient le télespectateur et lui permettaient de mieux discerner les enjeux de ce qu'il capte sont abolies. Le gouvernement qui a adopté pareille régression prône, par ailleurs, de tous temps, le développement de l'éducation aux médias. On croit rêver. Définition du placement de produit: "l'insertion d'un produit, d'un service ou de leur marque, ou la référence à ce produit, ce service ou à leur marque, dans un programme, moyennant paiement ou autre contrepartie". Est-ce la faute à l'Europe?La Commission européenne a créé de nouvelles règles publicitaires. Il s'agit d'autoriser le développement de la présence des annonceurs mais les différents pays ne sont pas obligés de souscrire à cette évolution. Il existe de la marge entre une autorisation et une obligation. Les 3 premiers pays sur 27 qui ont informé Bruxelles d'une pleine mise en œuvre de la nouvelle directive sont la Roumanie, la Slovaquie et la Belgique. La ministre de l'audiovisuel Fadila Laanan et le gouvernement de l'époque composé du PS et du CDH auraient pu proposer une mesure beaucoup plus restrictive que celle qu'ils ont décidé. Nous avons interogé Marc Janssen, le président du CSA, au cours de la conférence de presse du 22/12/2009: En transposant la directive européenne (dénommée directive SMA), si le gouvernement de la Communauté française avait opté de donner son feu vert au minimum de possibilités de "placement de produits", à quel(s) type(s) de programme(s) aurait-il été obligé de l'accorder? La réponse est claire: le gouvernement pouvait décider qu'aucun programme n'applique à ce point de la directive. Donc, s'il y avait eu une volonté politique, le placement de produits serait resté interdit sur nos chaînes. C'est d'autant plus vrai que d'autres pays, de même culture que la nôtre (la France, par exemple), feront nettement moins plaisir au lobby des annonceurs et des diffuseurs que la Communauté française. Deux tremblements de terrePar rapport à la tradition qui existait à la RTBF, deux "pratiques" autrefois conçues comme normales viennent d'être abolies, sans aucune explication ou motivation particulière. Sans débat auprès du public. Le plus discrètement possible...
Qu'est-ce qui est permis et où?Les placements de produits ne sont interdits que dans les journaux télévisés et les émissions pour enfants. Sur ce point, nos parlementaires n'ont pas tenu compte de leurs erreurs passées. En fait, le mot "enfant" n'a pas de définition juridique. Il n'existe que le terme de "mineur". Ils emploient néanmoins le terme "enfant", sans doute pour permettre aux adolescents d'être influencés par ces placements de produits. Dans tous les autres programmes (c'est très vaste!), le placement de produits peut légalement être employé. Xavier Diskeuve conclut un article intitulé "Voulez-vous placer vos produits?" ainsi dans "Vers l'Avenir" (le 09/01/2010): "Un peu de volonté politique et on pouvait être plus restrictif. Dans ce climat permissif où les régies publicitaires font la loi, ne pas s'étonner ensuite si l'esprit de service public s'évapore de plus en plus". Notre législateur a prévu deux types de "placements de produits"D'abord, il y a le "placement d'accessoires". En Communauté française, ce "placement d'accessoires" (et uniquement lui) est admis dans:
D'autre part, il y a le "placement de produits" contre paiement.
Est interdit le "placement de produit" pour les produits du tabac ou de cigarettes, ou émanant d'entreprises dont l'activité principale est la fabrication ou la vente de cigarettes et d'autres produits du tabac,ainsi que les médicaments disponibles uniquement sur ordonnance. Les règles relatives à la publicité pour les boissons alcoolisées s'appliquent également au placement de produit: En France, uniquement les fictions et les clipsEn France, le législateur a demandé au CSA, avant de se positionner, de définir les conditions du placement de produits: "Il sera cantonné aux fictions et aux vidéomusiques, une décision qui va à l'encontre des désidérata des chaînes qui se voyaient bien déjà truffer leurs divertissements de produits divers et variés" (Libération, 17/12/2009). Sans limite?Le nombre de minutes de publicités admises par heure a été règlementé, en ce qui concerne les annonces diffusées en dehors des émissions. Il est scandaleux que pareille obligation n'ait pas été adaptée pour les placements de produits. À terme, proposeront-elles encore des émissions concernant des thématiques qui ne sont pas propices à la moisson de pareilles rentrées financières? Quatre conditionsIl y a heureusement quatre conditions qui circonscrivent l'utilisation du placement de produit. "Avertissement" léger, quasi inutileComment le public pourra-t-il savoir qu'il y a du "placement de produit" dans tel ou tel programme? Lors de sa conférence de presse, Marc Janssen, le président du CSA, nous a indiqué que, pour le législateur, l'objectif de cette signalétique était d'informer le public: "Que le programme soit clairement identifié (...), il faut éviter pour le public toute confusion". Cette signalétique nous semble pourtant être l'arnaque de la décennie! Le CSA prévoit deux phasesLa première est dite "pédagogique". Elle commence le premier jour où une chaîne diffuse un placement de produit et dure trois mois. Avant le programme, pendant au moins 10 secondes et sur un panneau en plein écran, apparaît la mention "Le programme qui suit contient des placements commerciaux de produits, marques ou services". La seconde phase, après trois mois et prévue pour le long terme, ne conserve que l'obligation de faire apparaître le pictogramme PP (fini, le panneau explicatif en plein écran). Ce qui veut dire que, durant les années à venir, de très nombreux téléspectateurs verront à peine ce PP et ignoreront ce qu'il signifie. Si le CSA voulait éviter la sous-information du public à long terme et tout faire pour éviter sa confusion, qu'est-ce qui l'empêchait d'opter pour que sa phase qu'il qualifie de "pédagogique" ne s'applique sur le long-terme? Si le législateur et le régulateur veulent vraiment que les téléspectateurs sachent où et quand apparaissent les placements de produits, ils doivent contraindre le diffuseur à afficher l'incrustation lorsque les éléments publicitaires sont visibles à l'antenne. Il nous semble évident que l'information et la protection minimum du téléspectateur aurait consisté à obliger les diffuseurs à indiquer au moins avant et après diffusion du programme, dans un panneau en plein écran, les noms précis des différents produits, services ou marques qui y apparaîtront sous forme de placements de produits. Déposez plainte au CSASi vous découvrez une irrégularité dans l'application du placement de produit, ne manquez pas de déposer plainte au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) de la Communauté française. Bernard Hennebert |
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