Rubrique "À l'écoute des usagers du temps libre" de Bernard Hennebert
N°40 | Pour ne pas voir Johnny!
Le Ligueur du 27 août 2003
Ce qui est certain, c'est qu'il faut payer de plus en plus cher et de plus en plus tôt ses tickets de concerts. Ce qui l'est moins, c'est la garantie que ceux-ci vous soient livrés à temps!
Plus de sept mois avant le concert de Johnny Hallyday du 18 juin dernier au Stade Roi Baudouin, Jean-Michel Gez commande deux places sur le site internet de Ticket Club et paie grâce à sa carte bancaire une somme de 168 euros, soit les deux places à 75 euros + 10 euros de frais de service et 8 euros de frais de port.
Malhonnête
Quelques jours plus tard, la société Ticket Club envoie un courrier non daté à son client l'informant qu'elle n'a pu valider la commande et lui propose, dans les cinq jours, d'effectuer un versement sur son compte bancaire, ce qui fut fait illico.
En mai 2003, M.Gez réserve également deux places d'un bus affrêté à l'occasion de ce concert, soit 2x 13 euros pour le trajet depuis Mouscron.
Six jours avant le concert, il s'inquiète du fait que ses places ne sont pas encore arrivées en formant le seul numéro dont il a connaisance: un (très cher) 0900. Après neuf minutes d'informations inutiles pour lui, il peut enfin dialoguer avec une personne qui lui renseigne un autre numéro. Donc, ce vendredi 13 (!) juin, notre client forme une dizaine de fois ce nouveau numéro. En vain. Il devra appeler les renseignements pour découvrir qu'il s'agit d'une ligne de la billetterie de Forest-National! Après une série d'autres appels, il apprendra enfin que la commande de ses places a été annulée. Il envoie immédiatement un recommandé pour tenter de clarifier cette situation.
Cinq jours plus tard, le matin même du concert, notre témoin reçoit vers 10H sur sa boîte vocale un message de Ticket Club qui lui propose de retirer ses tickets à la billetterie du stade. Des places plus chères lui seront offertes en dédommagement. Une heure plus tard, un second appel de Ticket Club modifie cette offre. M.Gez explique: "Je pouvais le soir même faire la queue aux guichets pour retirer deux places moins chères que celles payées huit mois plus tôt. C'est la mort dans l'âme que j'ai refusé cette proposition malhonnête. Le 23 juillet, Ticket Club me rembourse mais seulement 168 euros. Bref, outre l'immense déception d'avoir raté ce fabuleux concert, j'ai perdu 40 euros en frais divers: deux places de bus, deux envois en recommandés, plusieurs appels téléphoniques dont un 0900 à près de 5 euros." Bien que fan, il n'a pas l'intention de renouveler l'expérience en novembre prochain, lors des prochains concerts de Johnny à Forest-National: "Je n'aurais pas d'autre choix que d'acheter ces nouveaux billets via un 0900! Je trouve cela bizarre, d'autant plus qu'on ne reçoit pas les places dès le paiement effectué."
Réguler
Que faire par rapport à pareille désinvolture qui frise la malveillance? M.Gez nous indique qu'il n'a pas l'intention d'aller en justice car les frais d'honoraires d'avocats sont trop élevés par rapport à l'importance du dommage. C'est d'ailleurs pour cette raison que l'industrie culturelle craint sans doute moins de maltraiter son public que les vendeurs de voitures ou les agences immobilières. Si notre "victime" avait eu la possibilité d'assister au spectacle du 18 juin, il aurait été malmené encore d'une autre manière! Une quinzaine de jours avant ce concert, différents articles parus dans la presse belge incitaient le public à assister à cet "événement", notamment parce que Johnny y chanterait en duo avec différents artistes dont Garou. Celui-ci fit défection non pas parce qu'il était malade mais bien parce qu'il terminait l'enregistrement de son album anglais et qu'il enchaînait par la mise en boîte d'un autre album en français.
Le démarrage de plus en plus hâtif des locations pour les spectacles de variété constitue un autre scandale. Un record avec plus de seize mois pour ce concert proposé à près de 60.000 spectateurs!
Pour le concert du 21 juin 1988 des Pink Floyd à Versailles, on pointait déjà le fait que les réservations démarraient six mois avant le déroulement de l'événement. Le délai s'amplifia à dix mois pour le "Forest-National" de Frédéric François d'avril 1994. Le 31 octobre 1997, Le Vif L'Express s'étonnait que les places pour Phil Collins au Flanders Expo pouvaient s'acheter onze mois à l'avance. La surenchère n'est pas prête de s'interrompre si aucune régulation ne se met en place. Il convient donc d'alerter les "politiques" et tout particulièrement la nouvelle ministre qui s'occupe de la protection des consommateurs, Mme Freya Vandenbossche(1).
Bernard Hennebert
bernard.hennebert@consoloisirs.be
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