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Nos médias (N°60 / 4 septembre 2007)
Imposé par le CSA à la RTBF:
Un "progrès dans l'info des administrés"
Objectif principal de la présente rubrique Nos Médias: prendre la défense des intérêts des usagers des médias. Ce rôle est d'autant plus utile qu'il n'existe pas d'associations d'envergure de téléspectateurs ou d'auditeurs en Communauté française.
Quel plaisir donc que d'entamer cette nouvelle saison en vous annonçant qu'une plainte déposée dans le prolongement de notre chronique publiée le 16 juin dernier (pages 32 à 35) a porté ses fruits!
Il ne s'agit pas d'une révolution mais chacun sait combien il est difficile en tant que citoyen de faire évoluer tel ou tel aspect d'un service public. Le changement est certes petit, mais concret, symbolique et surtout utile à long terme à tous les usagers qui s'intéressent à l'évolution de "leur" RTBF.
Erreur de communication
En juin dernier, nous détaillions l'un des (trop rares) points positifs du nouveau contrat de gestion du service public qui est applicable jusqu'en 2012. Enfin, la RTBF est obligée d'organiser un service de médiation "performant".
Une part du succès de celui-ci dépendra bien entendu de la promotion qui en sera faite auprès du public. Sur ce point, la RTBF fait preuve d'une mauvaise volonté flagrante.
Tout d'abord, elle ne propose de manière récurrente aucun spot sur ses antennes pour expliquer à ses usagers les droits de ceux-ci: où écrire, comment, quelle réponse est-on en droit d'attendre et dans quel délai, etc. Or, même à un niveau commercial ne serait-il pas rentable pour son image de mettre en avant dans son travail d'autopromotion pareil avantage que le public ne trouvera jamais sur les chaînes privées: le droit d'être entendu, l'obligation du dialogue, la possibilité d'une médiation?
Il est vrai qu'en Communauté française, on n'a guère l'habitude d'informer le public de ses droits audiovisuels. En France, au contraire, de bonnes habitudes se prennent. Ainsi, régulièrement, les chaînes indiquent aux téléspectateurs la signification des pictogrammes de la signalétique jeunesse (dite aussi antiviolence). En janvier 2005, 14 des diffusions d'un spot sur cette thématique par France2 avaient même été diffusées à des heures de forte écoute, entre 17H00 et 21H00, avec une audience moyenne de 3,5 millions de téléspectateurs. Celle proposée juste avant le 20H, le 16 janvier 2005, avait été captée par plus de 5 millions de personnes. Dominique Baudis, le président en fonction à l'époque du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) expliquait pourquoi pareille sensibilisation était si importante: "L'efficacité de la signalétique repose en effet à la fois sur la lisibilité du dispositif à l'antenne et sur les moyens d'information mis en œuvre pour convaincre les adultes de la nécessité de protéger leurs enfants de certaines images diffusées à la télévision"(1).
Rien de semblable chez nous mais sur ce point, aucune action ne peut être intentée contre la RTBF puisque le gouvernement, imprévoyant, n'a pas jugé utile de lui imposer pareilles obligations.
Le jeu des cinq erreurs
Par contre, le service public ne respectait pas le texte suivant, ce qui fut le sujet de notre article ainsi que de la plainte que nous avons adressée le 12 juin dernier au CSA de la Communauté française: le service de médiation "...dispose d'une page spécifique sur le site internet de la RTBF, sur laquelle figure: un formulaire permettant d'entrer en contact avec la RTBF; la procédure de traitement des demandes de renseignements et des plaintes des usagers; les informations de base relative à la RTBF; le rapport annuel de la RTBF..." (VI, 36).
Suite à notre interpellation, le régulateur a contacté la RTBF qui a modifié le contenu de son site internet. Nous en avons été avisés le 19 juillet.
Voici les cinq griefs que nous faisions et ce qu'il en est advenu.
- Le mot “plainte” est bizarrement absent du texte qui explique au public comment procéder: il y est noté que l'on peut entrer en contact pour donner son avis, exprimer ses idées et faire part de remarques, questions et suggestions! De quoi perturber certains usagers [la RTBF a fait évoluer son texte].
- Le même terme “plainte” est également oublié dans un encadré axé sur les réactions à la soirée Bye Bye Belgium du 13 décembre 2006: la RTBF y remercie les téléspectateurs pour leurs nombreux messages de félicitations et de soutien ainsi que des avis... On suppose que les plaintes sont à ranger pudiquement dans cette dernière catégorie! [la RTBF a supprimé cet encadré].
- On note d'autres erreurs ou approximations. La page renvoie au Médiateur de la Communauté française, mais omet de citer le Conseil supérieur de l'audiovisuel, alors que c'est auprès de ce dernier que le public peut déposer plainte en cas de dérégulation! [la RTBF a tenu compte de cette remarque].
- Le public doit sucer de son pouce qu'il doit cliquer sur l'un des sept mots mentionnés au bas de la page pour découvrir le texte du contrat de gestion et d'autres informations sur la RTBF. Ce mot n'a pas un rapport évident avec cette recherche: “entreprise” [la RTBF n'a pas tenu compte de cette remarque et nous avons envoyé une nouvelle plainte au CSA, le 24 juillet, avec le commentaire suivant: "...Ce serait pédagogique, très “éducation permanente” (une de ses missions) que la RTBF mette ainsi à la disposition du public les documents qui permettent de mieux connaître les obligations du service public. Ainsi aussi, mieux informé, le public pourrait poser des questions ou émettre des critiques plus pertinentes. Tout le monde y gagnerait: le public et la RTBF, à moins qu'elle n'ait pas envie que le public connaisse mieux ses droits, ce que je n'ose imaginer..."].
- Enfin et surtout: à aucun moment, les droits du public ne sont verbalisés: le fait qu'il ait droit à une réponse “circonstanciée” endéans les trente jours ouvrables pour ses plaintes et ses demandes d'information. Tout semble fait pour ne pas permettre aux usagers de connaître ses droits et de pouvoir agir avec efficacité. Pourquoi? [la RTBF a remédié à cette carence].
La RTBF: pas fière de sa nature?
Résultat tangible de l'instruction par le CSA de nos observations: la RTBF explique désormais correctement à ses usagers la nature de leurs droits(2).
Mais pourquoi fallait-il donc qu'une "pression citoyenne" la contraigne à le faire? Serait-il illogique que le service public ait la fierté et le plaisir de prendre lui-même pareille initiative?
Dans son rapport d'activité 2006 publié récemment(3), le Service du Médiateur de la Communauté française note "...La mention de l'existence du service du Médiateur de la CF sur le site de la RTBF et, par voie de conséquence, la possibilité d'y recourir, constitue indéniablement un progrès dans l'information des administrés". Ne va-t-il pas trépigner de joie en découvrant l'évolution de cette page du site ertébéen!(4)
Bernard Hennebert
bernard.hennebert@consoloisirs.be
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